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mercredi 11 mars 2015

Triste anniversaire: 4 ans plus tard, quel bilan à Fukushima ?




Le 11 mars 2015, jour du 4e anniversaire de la catastrophe, une femme se recueille près de la centrale ravagée de Fukushima. © YOSHIKAZU TSUNO / AFP



Le 11 mars 2011, un fort tsunami frappait la centrale nucléaire de Fukushima, sur la côte ouest du Japon. La restauration est lente et malaisée.

 

Où en est la centrale ?

Fin 2014, les combustibles entreposés dans la piscine du réacteur n°4 ont enfin pu être évacués, supprimant un grand danger de contamination. Le refroidissement des cœurs fondus continue d’augmenter les volumes d’eau nécessaire pour noyer les réacteurs. Tepco est donc obliger de construire des citernes supplémentaires. 200.000 tonnes d’eau étaient ainsi stockées début 2015. Le processus de décontamination radioactive de cette eau (procédé ALPS) est au point mort et ne redémarrera qu’en 2016.

Fukushima, combien de morts ?

Le 11 mars 2011, les 17 victimes de la centrale sont décédées à cause du tsunami. Les explosions des trois réacteurs n’ont fait aucun mort. En revanche, dans la province de Fukushima, le stress de l’évacuation, certaines pathologies associées à l’évènement et les souffrances psychosociologiques ont provoqué jusqu’à aujourd’hui le décès indirect de 1656 personnes, dont l’origine nucléaire est officiellement reconnue par les autorités. La province de Fukushima présente donc la particularité de constater plus de morts par la radioactivité que par le tsunami qui y a tué 1607 personnes. Dans les provinces voisines d’Iwate et de Migayi, les décès indirects de l’atome s’élèvent respectivement à 434 et 879 décès.

Combien va coûter la catastrophe ?

Le coût de démantèlement de la centrale de Fukushima est presque similaire à celui du tsunami. La reconstruction de routes et de lignes de chemin de fer est estimée à 7 milliards d’euros, la construction de logements à environ 50 milliards d’euros. Fukushima devrait au moins coûter 45 milliards d’euros pour son opérateur Tepco. En comptant le manque à gagner de l’arrêt des centrales nucléaires et les indemnisations, la catastrophe atteint 1500 milliards d’euros à la charge de l’électricien.

Quelles zones vont rester interdites?

La carte ci-après montre la situation actuelle. "Il est impératif pour les autorités japonaises comme pour Tepco d’accélérer le retour des évacués car ce retour atteste que la catastrophe est terminée et que la résilience de la catastrophe nucléaire est possible" témoigne Rémi Scoccimarro, géographe et maître de conférence en langue japonaise à l’université de Toulouse. Dès que la radioactivité atteint un seuil inférieur à 20 milliSiverts/an, le retour est autorisé. Les zones en orange sur la carte devraient être de nouveau autorisées au cours de cette année. En revanche, pour les zones rouges, aucune date ne peut être donnée. Les communes de Futaba (7500 habitants) et Okuma (11.000 habitants) viennent d’être choisies comme lieu de décharge de déchets radioactifs et ne seront plus jamais habitées.

Combien de personnes n’ont pas encore retrouvé leur maison ? Aujourd’hui, 80.000 habitants de la région de Fukushima sont toujours des réfugiés et ce nombre tend à rester stable. Il reste 245.000 personnes vivant dans des préfabriqués à la suite du tsunami, mais ce nombre baisse rapidement. Les victimes de la centrale sont réfugiées dans tout l’archipel (7000 vivent à Tokyo).

L’énergie nucléaire va-t-elle redémarrer ?

Le gouvernement de Shinzo Abe a approuvé le retour à l’énergie nucléaire. Aujourd’hui, quatre réacteurs, deux situés à Takahama près de Kyoto sur la mer du Japon et deux à Sendai dans l’île méridionale de Kyûshû ont reçu les autorisations du gouvernement central et de l’autorité de sûreté nuclaire nippone. Le feu vert définitif dépend maintenant des gouverneurs régionaux. Lesquels font face à de fortes oppositions des riverains. Depuis septembre 2013, le Japon n’a plus d’électricité d’origine nucléaire contre une part de 25% avant la catastrophe (cliquez sur la carte ci-dessous pour la voir en grand).

La nourriture reste-t-elle contaminée ?

L’université technologique de Vienne (Autriche) a analysé les résultats de 900.000 échantillons de nourritures effectués par l’administration japonaise entre 2011 et 2014. Leur étude qui vient d’être publiée dans Environmental Science and Technology montre que 3,3% des produits agricoles provenant de la région de Fukushima présentait des taux de radiation supérieurs aux normes japonaises et ont donc été retirés des marchés. En 2014, 0,6% de la nourriture provenant de cette région présentait encore une radioactivité excessive. Pour le Japon tout entier, les taux de non-conformité sont passés de 0,9% en 2011 à 0,2% en 2014. Les chances qu’une personne ait ingéré une nourriture lui faisant dépasser les limites annuelles de dose radioactive sont donc très faibles.

Source: - Loïc Chauvau Science et Avenir.

Fukushima: 4 ans après, des centaines de milliers d'hectares impossible à décontaminer                                                                                                    Fukushima: 4 ans après, des centaines de milliers d'hectares impossible à décontaminer

 

Après la catastrophe nucléaire de Fukushima, le gouvernement japonais a décidé de décontaminer la zone irradiée. Une centaine de communes sont concernées, certaines situées à plus de 100 km de la centrale. Mais la tâche est insurmontable, en particulier parce que 65 % de cette zone est couverte par la forêt, où il est impossible de faire baisser à main d’homme la radioactivité prisonnière des feuilles et de l’humus.

Selon l’Agence de l’énergie atomique japonaise, la commune de Kawaguchi est un "modèle" : à une vingtaine de kilomètre de la centrale de Fukushima-Daiichi qui a explosé en mars 2011, le maire annonce avoir réussi sa décontamination.

Pendant deux ans, plus d’un millier de"décontamineurs" ont méthodiquement lessivé les toits et les routes, et retiré 5 cm de sol dans les jardins, les cours et les champs pour faire baisser la radioactivité emprisonnée dans le sol.

90 millions d’euros pour diminuer la radioactivité d’une commune

La tâche est immense : à titre d'exemples, une maison produit une quinzaine de m3 de déchets contaminés, une école 150 m3. À cela, il faut aussi ajouter les déchets verts élagués le long des routes, et les forêts abattues dans un rayon de 20 mètres autour des habitations pour limiter le rayonnement radioactif des arbres. Plus de 200 000 m3 de matières irradiées ont ainsi été entreposés sur la commune dans cinq kariokiba, ces centres provisoires de stockage des déchets radioactifs.

90 millions d’euros ont été nécessaires pour diminuer le taux de radioactivité de cette seule commune de 3000 habitants, une somme prise entièrement en charge par l’État. Et Kawaguchi n’est que l’une des cent communes concernées par le projet national de décontamination, certaines villes étant situées à plus de 100 km de la centrale.

Un an et demi après l’accident nucléaire, le gouvernement japonais a en effet pris la décision de décontaminer la zone irradiée. S’il est impossible de faire disparaitre la radioactivité, l’enjeu est de la faire baisser dans les zones évacuées sous la barre fatidique des 20 millisieverts par an (limite annuelle de radiation autorisée au Japon pour la population), afin de pouvoir rappeler à terme les 130 000 personnes évacuées.

La limite d’irradiation acceptable multipliée par 20

Mais l’effort de décontamination ne s’arrête pas là : il s’étend aussi aux huit régions où la radioactivité est supérieure à 1 mSv/an. En effet, c’est cette limite qui est importante aux yeux de la population, celle qui était en vigueur avant la catastrophe. Aujourd’hui, la limite d’irradiation acceptable japonaise est vingt fois plus élevée que celle recommandée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Le Japon l’a augmentée après la catastrophe, face à l’incapacité d’appliquer la règlementation sanitaire à la suite de l’explosion de la centrale. De nombreuses personnes, des "réfugiés volontaires", ont préféré s’exiler plutôt que de vivre dans des zones irradiées.

20 000 "décontamineurs" continuent de remplir des sacs

Quatre ans après la catastrophe, 20 000 "décontamineurs" continuent ainsi de remplir des grands sacs en plastique bleus ou noirs qui s’entassent le long des routes, dans les cours des maisons, sur les bords des champs et dans les kariokiba. En tout, entre 30 et 55 millions de m3 de matière radioactive devraient émerger de la décontamination.

Pour ce qui est de l’efficacité de cette décontamination, les avis sont partagés : selon l'IRSN (Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire), elle permettrait de réduire la radioactivité entre 25 et 50 %.

Une autre difficulté est de gérer une radioactivité qui se déplace sans cesse. L’érosion et la pluie font en effet réapparaitre des particules radioactives. Il faut alors décontaminer à nouveau, et retirer 5 cm de sols supplémentaire.

Dans les sous-bois, le compteur Geiger s’emballe

Les forêts sont aujourd’hui la principale source de cette contamination secondaire. En effet, quand on rentre dans un sous-bois, le compteur Geiger s’emballe : la radioactivité double, voire quadruple si on la mesure à même le sol, car les arbres et l’humus ont largement fixé le césium radioactif libéré par l’explosion des réacteurs.

Or les forêts couvrent les deux tiers de la province de Fukushima. Et il est impossible d’y faire baisser à main d’homme la radioactivité. La solution de couper tous les arbres ou de retirer systématiquement la couche d'humus a été envisagée. Mais pour l’instant, la consigne est de limiter l’accès aux forêts. Pour la population, ces espaces autrefois très prisés sont devenus des zones dangereuses.

 

Quant à la décontamination de la "zone de restriction" qui se trouve à proximité de la centrale, elle n’est pas à l’ordre du jour. Le gouvernement espère y entreposer dans les mois à venir tous les déchets contaminés.

 

Source: Magali Reinert, reportage © 2015 Novethic  via wikistrike.com

 
 
 
 



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