Les États-Unis ont envoyé, en guise d’avertissement direct
à la Chine, un porte-avions, l’USS John C. Stennis, ainsi que deux destroyers et
deux croiseurs en mer de Chine méridionale. Si le Pentagone a minimisé
l’importance de cette massive démonstration de force, suggérant une routine, le
Navy Times a lui, souligné l’objectif des opérations en intitulant son article:
« Les États-Unis viennent d’envoyer un groupe d’attaque porte-avions pour faire
front à la Chine. »
Le groupe d’attaque Stennis comprend les destroyers
USS Chung-Hoon et USS Stockdale et le croiseur USS Mobile Bay. Un second
croiseur, l’USS Antietam, est également dans la région en route vers les
Philippines, tout comme le navire de commandement USS Blue Ridge, qui a
rencontré le Stennis avant son entrée en mer de Chine méridionale. Loin de
simplement passer dans la région, l’unité d’attaque Stennis entreprend depuis
quatre jours des exercices et des patrouilles dont 266 sorties d’avions de
combat.
L’envoi d’une unité aéronavale d’attaque fait suite à une
campagne croissante de condamnations et de provocations durant l’année passée
contre la récupération de terres et la prétendue militarisation d’ îlots
administrés par la Chine en mer de Chine méridionale. L’intervention de
Washington dans les différends maritimes entre la Chine et ses voisins fait
partie de sa stratégie générale du « pivot vers l’Asie » et du renforcement
militaire dirigée contre Pékin dans toute la région.
À ce jour, le
Stennis et les navires de guerre qui l’accompagnent ne semblent pas avoir
pénétré dans la limite territoriale de 12 milles marins autour des atolls
administrés par la Chine dans ces eaux. Mais comme le notait le Navy Times, la
marine américaine a déjà envoyé de manière provocante dans les eaux
territoriales chinoises deux destroyers lance-missiles, l’USS Lassen en octobre
dernier et l’USS Curtis Wilbur en janvier, des opérations menées en vertu la
prétendue liberté de navigation.
L’arrivée du groupe d’attaque Stennis
suit une série de déclarations incendiaires la semaine dernière de hauts
responsables américains, dont le secrétaire à la Défense Ashton Carter et
l’Amiral Harry Harris, chef du Commandement américain du Pacifique (PACOM) qui
ont plaidé pour une augmentation des dépenses militaires devant des commissions
du Congrès. Le Pentagone prévoit de déployer dans le cadre du « pivot » 60 pour
cent de ses navires de guerre et avions militaires dans la région Asie-Pacifique
d’ici 2020.
Leur témoignage devant le Congrès coïncidait avec des
révélations opportunes et exagérées dans les médias que l’armée chinoise avait
envoyé missiles et combattants antiaériens à Woody Island et construisait des
installations radar sur un autre îlot. L’Amiral Harris a accusé la Chine de
militariser la mer de Chine méridionale et dit que la marine américaine ferait
plus d’« opérations de liberté de navigation » et avec une plus grande
complexité dans l’avenir.
Dans un discours prononcé mardi, Carter a
critiqué la Chine pour avoir « placé des systèmes ‘anti-accès’ et des avions
militaires sur une île contestée » et averti que: « ces activités ont le
potentiel d’augmenter le risque d’une erreur de calcul et les conflits entre
États réclamant. » Pour souligner l’avertissement, il a carrément exigé que : «
la Chine… ne poursuive pas la militarisation en mer de Chine méridionale, » et
dit : « Les actions spécifiques auront des conséquences spécifiques. »
À
New Delhi le 2 mars, l’amiral Harris a proposé la formation d’une coalition
stratégique quadrilatérale, impliquant les États-Unis, l’Inde, le Japon et
l’Australie, pour contrer la Chine, et sauvegarder « l’ordre mondial fondé sur
des règles qui a si bien servi cette région. » Le système international fondé
sur des règles est devenu le slogan souvent répété d’un ordre mondial dominé par
les États-Unis et dans lequel Washington fixe les règles.
L’entrée du
groupe d’attaque Stennis en mer de Chine méridionale devait aussi coïncider avec
l’ouverture le 4 mars du Congrès annuel national du Peuple en Chine. Les
responsables chinois ont rejeté l’assertion des États-Unis que la Chine était en
train de militariser. La porte-parole du Congrès Fu Ying a déclaré : «
L’accusation peut conduire à une mauvaise estimation de la situation. Si vous
regardez la question de près, ce sont les États-Unis qui envoient les avions et
les navires militaires les plus avancés dans la mer de Chine méridionale.
»
Un commentaire publié le 4 mars par l’agence de presse d’Etat Xinhua
accuse les États-Unis de faire monter les tensions en mer de Chine méridionale
et souligne cette évidence que la Chine dépend de la liberté de navigation dans
ces eaux pour le commerce avec l’Afrique et le Moyen-Orient. « En tant que pays
fortement tributaire de cette importante voie navigable, la Chine est le dernier
pays au monde à souhaiter des turbulences en mer de Chine méridionale, »
dit-il.
La détermination de Washington à maintenir la « liberté de
navigation » pour ses navires de guerre dans ces eaux est liée à ses préparatifs
de guerre avec la Chine. La stratégie de combat « AirSea » du Pentagone envisage
des frappes massives aériennes et de missiles sur le continent chinois à partir
des navires de guerre, des sous-marins et des bases de l’ouest du Pacifique,
complétés par un blocus économique coupant les importations vitales de matières
premières et d’énergie de la Chine.
Le contrôle de la mer de Chine
méridionale est vital pour deux éléments de cette stratégie de guerre : elle est
voisine des bases militaires clés du sud de la Chine comme les installations
navales de l’île d’Hainan et en même temps elle se trouve à cheval sur les
routes maritimes menant, via l’Asie du Sud-Est, vers l’Afrique et le
Moyen-Orient.
La réponse de la direction chinoise au « pivot » des
États-Unis est conditionnée par les intérêts de classe qu’elle représente: ceux
d’une élite super-riche qui s’est elle-même enrichie au détriment de la classe
ouvrière à travers le processus de la restauration capitaliste. Tout en
recherchant sans cesse un accommodement avec l’impérialisme américain, le Parti
communiste chinois renforce sa propre armée et attise le nationalisme chinois
qui divise et sépare les travailleurs de Chine de ceux du reste de l’Asie et du
monde entier.
Le caractère délibéré de l’intervention du Stennis en mer
de Chine méridionale est souligné par le fait que le groupe a dévié, pour aller
dans cette zone, de sa route de la côte ouest des États-Unis vers la Corée du
Sud où il participera aux manœuvres conjointes Key Resolve/Foal Eagle. Les
exercices de la Corée du Sud et des États-Unis, impliquent cette année des
centaines de milliers de soldats appuyés par des blindés, de l’artillerie, des
navires et des avions de guerre. Ils répéteront une nouvelle stratégie commune
impliquant des frappes préventives de la Corée du Nord, dont l’assassinat de ses
hauts dirigeants.
Le passage du porte-avions d’une poudrière en Asie du
Sud-Est à un autre en Asie du Nord-est et d’une provocation à une autre, est une
manifestation de l’envergure des préparatifs américains de guerre contre la
Chine et de leur caractère irresponsable. Une erreur de calcul ou un faux pas a
le potentiel de déclencher un conflit aux conséquences terribles pour toute
l’humanité.
Source: Mondialisation
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