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samedi 19 décembre 2015

Vous voulez la guerre? La Russie est prête!

Personne n’a besoin de lire l’œuvre de Zbigniew Brzezinski, le Grand Echiquier (1997), pour savoir que la politique étrangère des Etats-Unis tourne autour d’un unique thème englobant tout : empêcher —par tous les moyens si nécessaire —l’apparition d’une ou plusieurs puissances capables de gêner l’unilatéralisme arrogant de Washington, non seulement en Eurasie mais dans le monde entier. Le Pentagone porte ce même message enchâssé dans le jargon démocratique : la doctrine de la domination à spectre total (the Full Spectrum Dominance doctrine). La Syrie conduit toutes ses estimations à s’effondrer comme un château de cartes. Il ne faut donc pas s’étonner si la norme actuelle à Washington, qui est dépourvue de toute chaîne visible de commandement –on peut à peine qualifier l’administration Obama de canard boiteux -, est l’angoisse. Le Pentagone s’est à présent engagé dans une escalade de type guerre du Vietnam en posant ses bottes sur le terrain dans tout le « Syrak ». 50 commandos se trouvent déjà dans le nord de la Syrie pour « conseiller » les Kurdes syriens du YPG, ainsi que quelques sunnites « modérés ». Comprendre : leur dire ce que Washington veut qu’ils fassent. La présentation officielle de la Maison Blanche est que ces commandos « soutiennent les forces locales » (les mots d’Obama) en coupant les lignes d’approvisionnement conduisant à la capitale du faux « Califat », Rakka. 200 autres forces spéciales envoyées en Irak vont bientôt suivre, prétendument pour « livrer un combat direct » contre la direction de Daech/Etat Islamique, qui est maintenant installée à Mossoul. Ces développements, présentés comme des « efforts » pour « se réengager partiellement en Irak et en Syrie » conduisent le petit monde des think tanks américains à formuler des rapports hilarants à la recherche de « l’équilibre parfait entre une invasion à grande échelle et un désengagement complet » —lorsque tout le monde sait que Washington ne se désengagera jamais des ressources pétrolières stratégiques du Moyen-Orient. En théorie, toutes ces bottes américaines sur le terrain devraient bientôt se coordonner avec une nouvelle coalition spectaculairement surréaliste de 34 pays « islamiques » (l’Iran n’y a pas été invité), créée pour combattre Daech par rien de moins que la matrice idéologique de toutes les variantes du salafisme djihadiste de l’Arabie Saoudite wahhabite. La Syrie est désormais « l’aérogare » des coalitions. Il y en a au moins quatre : le « 4+1 » (Russie, Syrie, Iran, Irak plus Hezbollah), qui combat vraiment Daech ; la coalition emmenée par les USA, une sorte de mini combinaison Otan-CCG, mais avec le CCG qui ne fait rien ; la collaboration militaire directe entre la France et la Russie ; et la nouvelle comédie « islamique » emmenée par l’Arabie Saoudite. Elles s’opposent à un nombre stupéfiant de coalitions et d’alliances salafistes djihadistes de circonstance qui peuvent durer quelques mois comme quelques heures. Et puis, il y a la Turquie, laquelle joue un double jeu vicieux sous Erdogan. Sommes-nous une fois de plus face au syndrome Sarajevo ? « Tendues » ne commence même pas à décrire les tensions géopolitiques actuelles entre la Russie et la Turquie, qui ne montrent aucun signe d’affaiblissement. L’Empire du Chaos en profite sans modération en tant que spectateur privilégié, tant que les tensions durent, les perspectives d’intégration de l’Eurasie sont nulles. Les services de renseignements russes ont certainement anticipé tous les scénarios possibles impliquant l’armée otano-turque à la frontière turco-syrienne, de même que la possibilité qu’Ankara ferme le Bosphore et les Dardanelles pour « l’Express syrien » russe. Erdogan pourrait ne pas être assez fou pour offrir un nouveau casus belli à la Russie. Mais Moscou ne prend aucun risque. La Russie a placé des navires et des sous-marins capables de lancer des missiles nucléaires au cas où la Turquie, sous la couverture de l’Otan, déciderait de frapper les positions russes. Le Président Poutine a été clair : la Russie utilisera l’arme nucléaire si nécessaire au cas où ses forces conventionnelles seraient menacées. Si Ankara opte pour une mission suicide en descendant un autre Su-24, ou un Su-34, la Russie dégagera tout simplement l’espace aérien tout le long de la frontière au moyen de ses S-400. Si Ankara, sous la couverture de l’Otan, répond en lançant l’armée turque contre les positions russes, la Russie utilisera ses missiles nucléaires, entraînant l’Otan dans la guerre, non seulement en Syrie mais potentiellement aussi en Europe. Et cela impliquerait l’utilisation de missiles nucléaires pour maintenir l’utilisation stratégique par la Russie d’un Bosphore ouvert. Voilà comment on peut tirer un parallèle entre la Syrie d’aujourd’hui et Sarajevo en 1914. Depuis la mi-2014, le Pentagone a déroulé toutes sortes de jeux de guerre —jusqu’à 16 fois, sous des scénarios différents –opposant l’Otan à la Russie. Tous ces scénarios étaient favorables à l’Otan. Toutes les simulations ont donné le même vainqueur : la Russie. Et c’est pourquoi le comportement fantasque d’Erdogan terrifie vraiment un bon nombre d’initiés, de Washington à Bruxelles. Quelques données sur les missiles de croisière Le Pentagone a parfaitement conscience de la puissance de feu que la Russie peut déchaîner si elle est provoquée au-delà des limites par quelqu’un comme Erdogan. En voici quelques exemples : La Russie peut utiliser le puissant missile SS-18 —dont le nom de code attribué par l’Otan est « Satan » ; chaque « Satan » transporte 10 ogives, chacune d’une puissance de 750 à 1000 kilotonnes, suffisante pour détruire une aire de la taille de l’Etat de New York [équivalente à la taille de l’Angleterre]. Le missile balistique intercontinental Topol M est le missile le plus rapide du monde, volant à Mach 21 (25.700 km/h) ; il n’existe aucune défense contre lui. Lancé depuis Moscou, il peut frapper New York en 18 minutes, et Los Angeles en 22 minutes et 8 secondes. Les sous-marins russes —de même que les sous-marins chinois —peuvent tirer au large des Etats-Unis et frapper des cibles côtières en une minute. Des sous-marins chinois ont fait surface à proximité de porte-avions américains sans se faire détecter, et les sous-marins russes peuvent faire la même chose. Le système antimissiles S-500 a la capacité de fermer hermétiquement la Russie aux missiles de croisière et intercontinentaux. (Officiellement, Moscou n’admet seulement que les S-500 n’entreront en activité qu’en 2016, mais le fait que des S-400 seront bientôt livrés à la Chine implique que les S-500 sont peut-être déjà opérationnels). Le S-500 fait ressembler le missile Patriot à un V-2 de la Seconde Guerre mondiale. Là, un ancien conseiller américain du chef des Opérations navales dit publiquement que tout l’appareil de défense de missiles américain ne vaut rien. La Russie a une flotte de bombardiers supersoniques constituée de Tupolev Tu-160, qui peuvent décoller de bases aériennes depuis le cœur de la Russie, voler au-dessus du Pôle Nord, lancer des missiles de croisière armés d’une tête nucléaire depuis une distance de sécurité au-dessus de l’Atlantique, et rentrer à la base pour regarder ce qui se passe à la télé. La Russie peut paralyser pratiquement toutes les bases avancées de l’Otan avec des armes nucléaires tactiques —ou de champ de bataille —à petites charges. Ce n’est pas un hasard si la Russie, au cours des derniers mois, a testé les temps de riposte de l’Otan à de multiples occasions. Le missile Iskander voyage à sept fois la vitesse du son avec une portée de 400 km. Il est dévastateur contre les terrains d’aviation, les points logistiques et autres infrastructures stationnaires le long d’un théâtre de guerre étendu, par exemple dans le Sud de la Turquie. Il faudrait que l’Otan mette tous ces Iskander hors service. Mais alors, ils devraient face aux S-400 —ou, pire, aux S-500 —que la Russie peut déployer dans les zones de défense sur presque tous les théâtres de guerre imaginables. Le positionnement des S-400 à Kaliningrad, par exemple, paralyserait toutes les opérations de l’Otan loin à l’intérieur de l’Europe. Présidant aux décisions militaires, la Russie privilégie l’utilisation du Contrôle Réfléchi (CR). C’est une tactique qui vise à transmettre à l’ennemi une information sélectionnée qui le force à prendre des décisions contraires à ses intérêts, une sorte de virus influençant et contrôlant son processus de prise de décision. La Russie utilise le CR de façon tactique, stratégique et géopolitique. Dans sa jeunesse, Vladimir Poutine a appris tout ce qu’il y avait à savoir à propos du CR à la 401ème école du KGB et ensuite au cours de sa carrière en tant qu’officier du KGB puis du FSB. Alors, Erdogan et l’Otan, vous voulez toujours faire la guerre ? Source: Mondialisation

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