Les troupes Américaines débarquent dans les pays baltes
Les
États-Unis se montrent décidés à défendre les frontières de
l’Alliance atlantique face à la Russie. Quelque 3000 GI ont
commencé à se déployer en Estonie, en Lettonie et en
Lituanie
Jamais encore autant de soldats américains
n’auront débarqué dans les pays Baltes, au nez et à la barbe de
la Russie. Ces derniers jours, quelque 3000 GI ont commencé à se
déployer dans les anciennes républiques soviétiques d’Estonie,
de Lettonie et de Lituanie afin de participer à trois mois de
manœuvres qui culmineront entre le 17 mai et le 6 juin prochains
dans un exercice multinational. Ils réintégreront ensuite leurs
quartiers de Fort Stewart, en Géorgie, mais laisseront sur place
leur matériel, notamment des chars Abrams, des véhicules de
transport Humvee et des hélicoptères.
Ce déploiement
résulte de l’interventionnisme militaire russe à l’œuvre dans
cette autre ex-république soviétique qu’est l’Ukraine. Un
interventionnisme qui a éveillé les plus grandes craintes dans les
pays Baltes, également frontaliers de la Russie et pareillement
dotés de minorités russophones. Des figures éminentes du camp
occidental ont pris par ailleurs la menace très au sérieux.
L’ancien secrétaire général de l’OTAN Anders Fogh Rasmussen a
par exemple assuré qu’il existe de «fortes probabilités» que le
Kremlin intervienne dans la région de la Baltique pour tester les
Etats-Unis et leurs alliés.
Un risque
limité
Contrairement à l’Ukraine, les trois Etats
baltes appartiennent à l’OTAN. Cette affiliation signifie qu’au
terme du fameux article 5 du traité de l’Atlantique-Nord une
attaque dirigée contre l’un d’entre eux sera considérée comme
une attaque contre tous les membres de l’alliance. Et que tous les
membres de l’alliance devront donc voler à son secours. La
question est dès lors de savoir si ces pays sont réellement
disposés à le faire. De passage en Estonie l’été dernier, le
président américain, Barack Obama, l’a affirmé solennellement en
déclarant que «la défense de Tallinn, Riga et Vilnius est aussi
importante que celle de Berlin, de Paris et de Londres».
En
appui de leurs déclarations, les autorités américaines ont lancé
l’opération «Atlantic Resolve» («Détermination atlantique»).
Cette initiative consiste à témoigner de la solidarité des
Etats-Unis envers leurs alliés est-européens en dépêchant des
forces sur leur sol, dans leurs eaux et dans leur ciel. L’une de
ces actions emblématiques a été la participation de blindés
américains à un défilé militaire marquant l’anniversaire de
l’indépendance de l’Estonie dans la ville de Varna, tout près
de la frontière russe.
L’envoi de 3000 hommes dans les pays
Baltes est l’intervention la plus spectaculaire à ce jour. «Ce
déploiement est dérisoire sur le plan militaire, commente Matthieu
Chillaud, chercheur en sciences politiques à l’Université de
Tartu, en Estonie. La Russie, si elle le voulait, n’aurait aucune
peine à envahir la région. Mais il est énorme sur le plan
symbolique. Les militaires de l’OTAN ont été jusqu’ici très
rares sur place. Or là, ils débarquent en nombre avec des
chars!»
Une attaque russe est-elle possible? Matthieu
Chillaud n’y croit pas. «Il serait suicidaire de la part du
Kremlin de s’en prendre à des membres de l’OTAN, explique-t-il.
La Russie n’en est pas là. Si elle envoie fréquemment des avions
de chasse au-dessus des pays Baltes et si elle mène des manœuvres
terrestres avec la Biélorussie aux abords de leurs frontières,
c’est pour rappeler qu’elle est une puissance dans la région et
qu’il faut compter avec elle. Rien de plus.»
A en croire le
chercheur, la perte des pays Baltes ne suscite aucune nostalgie
particulière à Moscou. «La Russie ne peut pas prétendre contrôler
la mer Baltique, passée presque entièrement sous domination
occidentale, explique-t-il. Dès lors, elle se contente des deux
débouchés qu’elle possède sur ses eaux: la «lucarne» de
Saint-Pétersbourg et l’enclave de Kaliningrad. Posséder les côtes
estonienne, lettone et lituanienne ne lui apporterait rien de
fondamental en plus.»
«La Russie et l’OTAN ont beau se
disputer, leurs actions restent rationnelles, souligne Matthieu
Chillaud. Elles montrent leurs muscles mais n’ont pas intérêt à
nourrir une escalade en mer Baltique. Elles affrontent des menaces
communes autrement plus inquiétantes au Moyen-Orient.»
Source: letemps.ch / Étienne Dupuis
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