Pendant 19 minutes,
avec la plus extrême précision, un groupe, – disons, un commando
de snipers a
attaqué une centrale touchant
avec une efficacité évidemment chirurgicale des points sensibles
de la centrale entraînant des perturbations de fonctionnement
considérables. L’attaque fut très particulière, et sans doute
la première du genre : Le plus intéressant est que l’information
vient de déclarations publiques qui viennent d’être faites et
qui n’ont guère eu d’échos dans les médias. Il semble qu’il
y ait eu au départ des informations venues d’un ancien officiel,
puis relayées bientôt par des sources effectivement officielles.
L`incident a été qualifié d’“attaque terroriste domestique le
plus significative contre le réseau électrique du pays”. Aucune
arrestation n’a pu être opérée, aucune piste sérieuse n’a
été localisée. Certaines hypothèses avancent l’idée d’une
“répétition” pour une attaque plus importante et plus
significative.
D’autre part
encore, le FBI n’a aucune information sur rien, et qui décrète
pourtant qu’il ne s’agit pas d’une organisation terroriste,
alors que l’attaque représente évidemment une réelle
organisation d’une opération de commando. Aussi, un responsable a
rappelé le thème d’une possible attaque contre des installations
de nucléaire civil (un “Fukushima américain”, écrit-il
dramatiquement), se plaçant ainsi, objectivement, du côté des
forces antiterroristes qui sont en général dénoncées comme
adversaires des dissidents anti-Système aux É-U même.
L’impression
générale laissée par cet événement si incertain, – ce côté
public et pourtant sans le moindre écho médiatique sérieux, –
soumis à des interprétations qui le sont tout autant, – un tel
acte de terrorisme doit-il être ressenti, y compris par des
“dissidents”, comme une attaque contre les É-U, ou bien
s’agit-il d’un acte de colère intérieur, un acte contre le
“centre fédéral” et toutes les organisations qui le
représentent, concrètement ou symboliquement, – cette impression
générale reflète le désarroi régnant aux É-U. On trouve divers
courants de communication très contradictoires qui alimentent ce
climat si incertain. D’un côté, les nombreuses rumeurs de
militarisation, les achats massifs de munition par le Home Security
Department, l’équipement quasi-militaire des polices, le
durcissement de la répression, bien entendu le réseau de
surveillance de la NSA, tous ces actes qui sont considérées par
une partie importante de l’opinion publique comme des mesures
d’exception mises au point par le “centre” contre le citoyen.
D’un autre côté, la très grande faiblesse d’information
concernant certains événements, rapidement étiquetés comme
“accidents industriels” (comme l’explosion de l’usine de
fertilisants industriels de Waco, au Texas, le 17
avril 2013) et qui pourraient aussi bien être le résultat
d’attaques terroristes. Enfin, l’attaque elle-même, d’avril
dernier, qui ne renvoie à aucun type d’acte de terrorisme
habituel, qui ne cherche aucune publicité médiatique et de
communication, qui semble rechercher une efficacité calculée, qui
montre effectivement cette efficacité et semble échapper à tous
les réseaux habituels de renseignement, c’est-à-dire ne
cherchant nullement à exploiter dans un sens ou l’autre le
système de la communication. (Même l’hypothèse d’une
opération de provocation des autorités n’a guère de sens, en
raison de l’absence complète de publicité autour de l’événement,
qui réduit son effet de communication et son effet psychologique
d’autant.)
... En d’autres
temps, un tel événement aurait été mis sur le compte des
impondérables et incontrôlables de la vaste population des
États-Unis, avec sa diversité extrême et ses habitudes de
violence. Aujourd’hui, une telle interprétation paraît
infiniment plus difficile, jusqu’à se demander si, en d’autres
temps, un tel événement, dans les conditions où on le décrit,
eût été possible... Finalement, les conditions même de
discrétion, d’absence de recherche de publicité, de
non-exploitation de la communication, représentent un cas assez
inédit, comme une sorte de recherche de l’effet par absence
d’effets. Les pressions de la situation de critique du monde font
que, de moins en moins de choses, d'incidents, de tensions sont
laissées au hasard aujourd'hui. Tout prend une signification
aujourd'hui, même le silence et l'ignorance de l'acte.
Extraits de Rorschach
Aucun commentaire:
Publier un commentaire